Une tempête sous les robes… du côté de l’Union Syndicale des Magistrats (USM), réunie en congrès annuel vendredi à Clermont-Ferrand, rien ne va plus. La Garde des Sceaux ayant séché le rendez-vous, c’est le secrétaire général de la chancellerie, Gilbert Azibert, qui s’est pris un vent, plus proche du typhon que de la bise…
Rachida Dati ne s’est donc pas rendue au congrès de l’Union Syndicale des Magistrats organisé vendredi dernier à Clermont-Ferrand. Elle s’est désisté à la toute dernière minute, sans autre justification qu’un « agenda particulièrement chargé« . Un Garde des Sceaux qui snobe le congrès annuel du syndicat majoritaire (62%) de la profession est une première, de mémoire de magistrat. « Un geste de mépris et comme une fuite pour ne pas répondre aux questions« , selon le président de l’USM, Bruno Thouzellier. Un « signe de grande lâcheté » pour le secrétaire général de l’USM, Laurent Bedouet. Ambiance…
Le ministère de la Justif’
Quelques mois après la mise en musique de la carte judiciaire et son lot de contestations, ce congrès survenait aussi deux jours après la publication d’un rapport du Conseil de l’Europe, épinglant la mauvaise santé du système judiciaire français. Dans une vaste étude visant à mesurer l’efficacité des systèmes judiciaires des pays européens, l’institution fait apparaitre que la France se situe au 35ème rang sur 43, allouant 0,19% de son PIB à la justice. Et dans beaucoup de domaines, la France est à la traine, ce qui a amené l’USM à intituler son congrès « justice pauvre… pauvre justice ». « Il est difficile de comparer des systèmes judiciaires totalement différents« , s’est justifié le ministère de la justif’.
Au-delà de ça, les magistrats se plaignent régulièrement du manque de lisibilité de l’actuelle politique judiciaire et d’une politique de réaction « au coup par coup ». « Nous sommes coincés entre des injonctions contradictoires : on nous demande d’être répressifs. Et on demande aux juges d’application des peines de faire sortir les prisonniers« , explique Nicolas Léger, magistrat à Rennes, qui a ensuite apostrophé Gilbert Azibert : « Vous avez devant vous des serviteurs de l’Etat qui sont écoeurés par le mépris et la défiance. Jamais la situation n’a été aussi dégradée« . Une juge des enfants de Châteauroux demande : « quelle loi dois-je violer pour faire mon travail ?« , arguant que les faibles moyens alloués à son tribunal l’empêchent de respecter les procédures. Les témoignages se succèdent à la barre…
Des magistrats en kilt…
Les magistrats n’avaient pas besoin de tout cela pour éprouver du ressentiment. Depuis quelques mois, ils se sentent acculés, accusés, en permanence. Un exemple, un seul… Dans un contexte de surpopulation carcérale généralisée, environ 90 détenus se sont suicidés depuis début 2008, sans aucune réaction, ou presque, de la part du ministère de la Justice. La semaine dernière, les médias se sont échauffés après une série de suicides d’adolescents, et Rachida Dati a dû intervenir en urgence… elle a ordonné une « enquête » sur la mise à exécution d’une décision judiciaire, « enquêtée » elle aussi. Et qu’importe que le magistrat ayant jugé l’affaire avait suivi les réquisitions du parquet, donc du ministère… Qu’importe ? Puisque de toutes façons, la ministre a publié un décret à la hâte, imposant avant toute incarcération de mineur sa présentation devant un magistrat du parquet, avant même que le résultat de ces « enquêtes » soient connues… Et qu’importe que le taux de surpopulation carcérale batte record après record ? La faute aux magistrats…
Et les girouettes s’affolent.
« On ne sait plus à quoi se vouer. On reproche à un collègue de faire son travail, en faisant exécuter la décision. Le plus souvent on fait le reproche inverse. Quoique l’on fasse, c’est mal« , explique François Thévenot, vice-procureur à Lyon. « Le problème avec Madame Dati, c’est qu’elle fait de la présomption de culpabilité des magistrats« , se plaint Pierre-Yves Calais, vice procureur et secrétaire de la section de l’USM au TGI de Paris. « Il y a d’abord eu la loi sur les peines plancher, qui, comme nous l’avions prédit, a rempli les prisons, et aujourd’hui un projet de loi pénitentiaire dont le but est de les vider« , relève la vice présidente d’un tribunal de grande instance. « Des prévenus vont donc se voir condamnés à des peines plus lourdes qu’avant pour finalement partir directement en aménagement de peine, sans faire de prison« déplore-t-elle.
Mais comme Gala.fr le fait si justement remarquer, « gageons que la future maman préfère aujourd’hui à la virulence des échanges, l’assurance des louanges et la perspective des langes »… Bonne chance ma maman…
(Sources : lemonde.fr, maitre-eolas.fr, lemonde.fr, lemonde.fr, france3.fr, usm2000.free.fr, coe.int, afp.google.com)