Re(ma)niement  - Christine Lagarde Frédéric Lefebvre Gouvernement Nicolas Sarkozy Politique
| 15/11/2010

Re(ma)niement

Image d’illustration © 704417|Pixabay|CC0 or Pixabay

Ô divine surprise. Un remaniement ! Exit l’identité nationale, sus à l’intégration, haro sur la santé, l’écologie et l’ouverture. Passons aux choses sérieuses… c’est en substance le message envoyé par l’Élysée.

Coup de théâtre ! Samedi soir, juste avant un Champs-Elysées his-to-ri-que, le gouvernement a démissionné. Dimanche soir, juste avant le JT de 20h, une nouvelle équipe a été nommée. Le communiqué est tombé, et dès la première phrase, stupeur ! « Sur la proposition du premier ministre, le Président de la République a nommé »… Un coup d’Etat !? Ce n’est plus Nicolas Sarkozy qui choisit ses ministres… Mais que fait la police ? Elle écoute les journalistes. On ne peut pas être partout. Ahrgg… Fausse alerte ! On me glisse dans l’oreillette qu’il s’agit simplement de faire semblant de respecter la Constitution. Vrai qu’un gouvernement censuré pour inconstitutionnalité, ça ferait mauvais genre… Admettons.

Huit mois ! C’est le temps qui se sera écoulé entre l’annonce du remaniement et sa concrétisation. Huit longs mois qui auront donné lieu à une (dur’)lutte au plus haut sommet de l’Etat. Bref, le nouveau gouvernement est enfin tombé. Oups, disons plutôt qu’il a été annoncé. Résultat : le collaborateur Fillon reste en place, à la tête d’un gouvernement à l’ancienne, doté de 31 membres (quasiment tous issus du parti majoritaire), soit sept de moins que le précédent. Un mieux mais toujours plus que les 15 promis en 2007. Il compte onze femmes, contre treize précédemment. Toujours loin de la parité promise en 2007.

Les sacrifiés

Huit victimes : le nouveau retraité Eric Woerth (Travail), l’ex-futur-ex premier ministre Jean-Louis Borloo (Ecologie), Rama Yade (Sports), Bernard Kouchner (Affaires étrangères), Christian Estrosi (Industrie), Fadela Amara (Ville), Hervé Morin (Défense). Bien sûr, la plupart (sauf Woerth et Estrosi) se targuent d’être partis volontairement, de ne plus vouloir cautionner les pratiques d’un gouvernement sans foi ni loi, de vouloir passer à autre chose, etc.

Les reniements ministériels

Cinq disparitions : la santé (désormais rattachée au travail et à l’emploi), l’ouverture, l’écologie, l’intégration et l’identité nationale. Et ouais, si Eric Besson (maintenant encarté UMP) reste au gouvernement, c’est en tant que ministre de l’Industrie, le ministère de l’immigration étant maintenant rattaché à celui de l’Intérieur. Il a en outre perdu ses mentions « identité nationale » et « intégration ». Il aurait en effet été délicat de confier à Brice Hortefeux, qui vient de se faire condamner pour « injure raciale », le soin de s’occuper de sujets aussi sensibles. Tout ça pour ça… Quant au ministère de l’Ecologie-ça-commence-à-bien-faire, récupéré par Nathalie Kosciusko-Morizet, il est rétrogradée en quatrième place protocolaire. Forcément puisque ce n’est désormais plus un ministère d’Etat. Il perd en outre une grosse partie de son pouvoir, puisque privé de l’Energie, qui rejoint l’Industrie de Besson… qui aura tout loisir d’expulser les antinucléaires (on s’amuse comme on peut).

Conflits d’intérêt : toujours plus haut, toujours plus loin, toujours plus fort…

En bref, Alain Juppé revient, droit dans ses bottes, ministre de la Défense et numéro deux du gouvernement. Et tant pis s’il déclarait, il y a deux ans, : « je n’irai pas au gouvernement […] je serai un maire à plein temps ». Xavier Bertrand retrouve son poste d’il y a huit mois, au ministère de l’Emploi, du Travail et de la Santé. Jean-François Copé, son rival, hérite du Secrétariat général de l’UMP. Font aussi leur entrée : Maurice Leroy (nouveau centre), à la Ville, Philippe Richert (UMP) aux Collectivités territoriales. Patrick Ollier (UMP), aux Relations avec le Parlement. Jeannette Bougrab, présidente de la HALDE en difficulté, est nommée secrétaire d’Etat chargée de la jeunesse et de la vie associative. Michel Mercier (centriste), visé par une enquête préliminaire pour favoritisme (dans l’affaire Rhônexpress), devient… ministre de la Justice ! On n’est jamais mieux servi que par soi-même.

Freddy enfin au box office

Et, et, et… le meilleur pour la fin : Frédéric Lefebvre est (enfin) nommé secrétaire d’Etat auprès de la ministre de l’économie, « chargé du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation ». Ouf, vous pouvez reprendre votre souffle. Si ce n’est pas le poste le plus en vue du gouvernement, c’est celui dont l’intitulé est le plus long. Les violeurs de jeunes filles, les assassins-revendeurs de faux médicaments, les manipulateurs d’adolescents et autres terroristes en herbe n’ont qu’à bien se tenir ! Un seul mot : bravo !

Un remaniement pour rien ?

Que nenni, selon Christine Lagarde, ce gouvernement est « totalement révolutionnaire ». Ah ? Oui oui, car Nicolas Sarkozy a effectué un « tour complet à 360 degrés ». Donc qui n’a servi à rien, pourrait-on logiquement conclure. « On est revenu à l’impératif de la solidité et du professionnalisme », a encore insisté la toujours ministre de l’Economie, affirmant qu’il n’y avait « pas de place pour l’improvisation ». Pas sûrs que les sortants apprécient la boutade !

Résumons…

Premier Ministre (et collaborateur de l’Elu) :

    * François Fillon (UMP)

Ministres d’État :

    * Alain Juppé (UMP) : Défense et anciens combattants (ça lui va bien)
    * Michèle Alliot-Marie (UMP) : Affaires étrangères et européennes

Ministres (pas d’État) :

    * Nathalie Kosciusko-Morizet (UMP) : Écologie, développement durable, transports et logement (sans l’énergie)
    * Michel Mercier (centriste à tendance UMP… ?) : Justice et libertés (l’homme qui tombe à pic)
    * Brice Hortefeux (UMP) : Intérieur, outre-mer, collectivités territoriales et immigration (… auvergnate ?)
    * Christine Lagarde (UMP) : Économie, finances et industrie
    * Xavier Bertrand (UMP) : travail, emploi et santé (le travail, c’est la santé !)
    * Luc Chatel (UMP) : éducation nationale, jeunesse et vie associative
    * François Baroin (UMP, pro-Villepin) : budget, comptes publics, fonction publique et réforme de l’Etat, porte-parole du Gouvernement
    * Valérie Pécresse (UMP) : enseignement supérieur et recherche
    * Bruno Le Maire (UMP, pro-Villepin) : agriculture, alimentation, pêche, ruralité et aménagement du territoire (et magouilles comptables pour échapper aux quotas de pêche)
    * Frédéric Mitterrand (proche UMP) : culture et communication (c’est pour quand son prochain bouquin ?)
    * Roselyne Bachelot-Narquin (UMP) : solidarités et cohésion sociale (il existe des vaccins pour ça ?)
    * Maurice Leroy (NC) : ville
    * Chantal Jouanno (UMP) : sports

    * Patrick Ollier (UMP) : relations avec le Parlement
    * Eric Besson (proche UMP) : industrie, énergie et économie numérique (Vers l’expulsion des pirates informatiques ?)
    * Henri de Raincourt (UMP) : coopération
    * Philippe Richert (UMP) : collectivités territoriales
    * Laurent Wauquiez (UMP) : affaires européennes
    * Nadine Morano (UMP) : apprentissage et formation professionnelle (elle en a bien besoin !)
    * Marie-Luce Penchard (UMP) : chargée de l’outre-mer

Secrétaires, d’État :

    * Pierre Lellouche (UMP) : commerce extérieur
    * Nora Berra (UMP) : santé
    * Benoist Apparu (UMP) : logement
    * Georges Tron (UMP, pro-Villepin) : fonction publique
    * Marie-Anne Montchamp (pro-Villepin) : cohésion sociale (en charge des pompiers ?)
    * Thierry Mariani (UMP) : transports
    * Frédéric Lefèbvre (UMP) : commerce, artisanat, petites et moyennes entreprises, tourisme, services, professions libérales et consommation
    * Jeannette Bougrab (UMP) : jeunesse et vie associative