Le 3 décembre 2025, un rapport explosif de l’ONG néerlandaise SOMO a dévoilé l’existence d’une alliance secrète de onze multinationales ayant mené une campagne coordonnée pour affaiblir — voire démanteler — la directive européenne sur le devoir de vigilance. Une stratégie qui a également contribué à rapprocher la droite européenne de l’extrême droite.
Multinational’s Eleven : hold-up sur les droits humains
« Diviser pour mieux régner »
Les documents obtenus par SOMO montrent que le Roundtable se réunit chaque semaine depuis mars 2025 pour élaborer une stratégie d’influence ciblée sur les institutions européennes. L’objectif est clair : réduire au strict minimum la portée de la CSDDD, jugée trop coûteuse pour leurs intérêts financiers.
Opérations ciblées – Emmanuel Macron en VRP
Les documents révèlent aussi la volonté de Roundtable de supprimer l’article climat de la directive. En juin 2025, les entreprises ont tenté d’obtenir des interventions politiques directes auprès de chefs d’État européens pour faire basculer les négociations. Et des interventions du président français Macron et du chancelier allemand Merz ont effectivement eu lieu, entraînant une dilution majeure des textes. ✅
Certaines entreprises sont assignées à des gouvernements précis : TotalEnergies se chargeait de taquiner la France, la Belgique et le Danemark. Pour ExxonMobil, c’était l’Allemagne, la Hongrie, la Tchéquie et la Roumanie.
Commission européenne contournée
Deux directions générales — Justice/Consommateurs et Services financiers — sont jugées trop opposées aux demandes du Roundtable. Le plan consiste donc à les marginaliser en s’adressant directement aux « cibles » définies, Ursula von der Leyen et deux commissaires clés, via des lettres poussées par des organisations patronales. ✅
Forcer l’alliance avec l’extrême droite
Le Roundtable a aussi incité le Parti populaire européen (PPE) à rompre avec le centre pour s’aligner sur l’extrême droite et adopter la version la plus faible possible de la directive. En novembre 2025, le PPE finit par adopter une ligne correspondant aux demandes du groupe. ✅
Pressions internationales
Le Roundtable a travaillé avec l’administration Trump pour que la CSDDD soit présentée comme un « obstacle majeur » à un accord de libre-échange UE–États-Unis. Objectif : pousser l’UE à reculer sur trois points clés — responsabilité civile, plans de transition climatique, extraterritorialité — ce qu’elle a accepté lors de l’accord commercial d’août 2025. ✅
L’alliance voulait également mobiliser des pays tiers avec une « visibilité américaine minimale ». Le Qatar avait déjà menacé l’UE de couper ses livraisons de gaz naturel liquéfié en cas d’application stricte de la directive. En octobre 2025, les gouvernements du Qatar et des États-Unis ont publié une lettre commune demandant de revoir ou abroger la directive. ✅
Financements sous la table
En août 2025, le Roundtable prévoit de financer le TEHA Group à hauteur d’au moins 185 000 € pour publier un rapport mettant en doute l’étude d’impact de la Commission et organiser un événement influenceur avec des décideurs européens — sans révéler ses bailleurs. TEHA a confirmé après coup que plusieurs entreprises du Roundtable avaient bien financé le rapport. ✅
L’Europe vulnérable
Pour SOMO, même si a priori rien n’est illégal, l’affaire illustre une grave fragilité des institutions européennes face à l’influence organisée de grandes multinationales polluantes. Les révisions du texte, les prises de position gouvernementales et les manœuvres internationales montrent à quel point une poignée d’entreprises peut remodeler une législation censée protéger les droits humains et le climat.
Ce qu’on appelle un plan qui se déroule sans accroc ✅