Quand Baudouin Prot flingue le bonus-malus des traders...  - Banques Baudouin Prot BNP Paribas Nicolas Sarkozy Sénat
| 23/09/2009

Quand Baudouin Prot flingue le bonus-malus des traders…

Image d’illustration © 704417|Pixabay|CC0 or Pixabay

A se taper la tête contre les murs. Mercredi dernier, devant quelques sénateurs incrédules, le président de la Fédération bancaire Baudouin Prot a totalement dézingué le système des bonus-malus des traders, triomphalement imposé par Nicolas Sarkozy pour dégonfler les scandales à répétition.

Ça deviendrait presque une habitude. Le 3 février 2009 déjà, les dirigeants des six grandes banques françaises étaient auditionnés devant la commission des Finances de l’Assemblée nationale. Nicolas Sarkozy se vantait alors d’avoir sauvé les banques françaises d’une faillite certaine. Interrogés sur ce plan de sauvetage, les argentiers avaient alors tenu un discours hallucinant, détruisant méthodiquement les uns après les autres les arguments du chef de l’Etat. L’outrage n’avait guère trouvé d’échos dans les médias…

Sarkozy tape du poing sur la table (basse)

Rebelote. Mercredi dernier, c’est devant la commission des Finances du Sénat que s’est produit Baudouin Prot, président de la Fédération bancaire française (FBF) et Directeur Général de BNP-Paribas (voir la vidéo). Quelques semaines plus tôt, sa banque était au coeur du scandale des bonus exorbitants des traders. Nicolas Sarkozy avait alors tapé du poing sur la table. On allait voir ce qu’on allait voir… Le chef de l’Etat venait d’imposer aux banques le système de bonus-malus étalé dans le temps et tenant compte des risques individuels pris par les traders, ainsi que leurs résultats réels à long terme. Une véritable révolution (même si le système existait déjà depuis 6 mois) !

Bonus-malus gagnant-gagnant

Les sénateurs ont voulu en savoir plus sur le système. Ils n’auront certainement pas été déçus. Finalement, si les bonus seront bien versés en deux ou trois fois (sur deux ou trois ans), « ce qui est versé la première année ne peut pas être repris » a déclaré Baudouin Prot, devant une assemblée médusée, qui reposera la question à plusieurs reprises. A chaque fois la même réponse : « ce serait extraordinairement complexe en droit du travail français d’aller reprendre du salaire ». Exit le malus, donc… il ne s’agira que d’adapter le bonus aux performances du trader. Ce qui existe déjà, en fait.

Evaluation au doigt levé (hmmm…)

Et concernant les méthodes d’évaluation, qui devaient être individuelles, étalées dans le temps et fonction des risques ? Rien, nada, walou… « Nous n’avons aucunement les moyens de suivre sur trois ans les opérations individuelles d’un trader. C’est économiquement et comptablement totalement impossible » a affirmé Baudouin Prot, un brin nerveux. Interloqué, Jean Arthuis, président de la commission, insiste : Mais alors, « comment moduler la rémunération des traders sans suivre les contrats de chacun d’entre eux ? ». Réponse sans appel : « La rémunération variable de chaque opérateur de marché est décidée par la hiérarchie en fonction des performances appréciées globalement. Ce n’est pas une formule mathématique ». Traduction : les traders font ce qu’ils veulent, nous les rémunérons comme nous voulons, et bonjour chez vous.

Si on s’en doutait un peu, ça va mieux en le disant. Et dire que ce système des bonus-malus sera la principale mesure décidée au G20… ça laisse rêveur.

(Au passage, Baudouin Prot a aussi affirmé à plusieurs reprises que le volume des crédits accordés par les banques françaises était plus que satisfaisant, alors que l’Association française des sociétés financières parle d’une contraction « d’une ampleur historique », de -16 à -26%).