Etat, interventionnisme, nationalisation… dans le petit monde de l’ultralibéralisme, les gros mots d’hier deviennent les prières d’aujourd’hui. La crise financière est passée par là, et les apôtres du libéralisme lancent tous les jours d’humiliants SOS à l’ennemi de toujours… la puissance publique.
Première à ouvrir le bal l’été denier, Northern Rock. La banque de Newcastle reçut l’aide de la Banque d’Angleterre. Verdict : nationalisation… « temporaire » s’empresse-t-on de rajouter au pays de la liberté économique. Puis l’impensable ! Aux États-Unis, dans le coeur de l’église de la « concurrence libre et non faussée », sur l’autel de la cathédrale de la dérégulation, la FED décide de rattraper la 5ème banque d’investissement du pays par le col, avant qu’elle ne s’écrase définitivement. Bear Stearns survivra donc grâce à l’intervention de l’État américain, qui assure le temps de trouver un repreneur. Sans parler de Citigroup, d’UBS, de Morgan Stanley et Merrill Lynch, recapitalisés en urgence par des fonds souverains d’État.
Les bourses de Londres, Wall Street, et Zurich, les trois places fortes de la mondialisation financière, ont demandé dès la fin de l’année 2007, le soutien des institutions publiques. Alan Greenspan, l’ancien président de la Réserve fédérale en personne, demande l’intervention du gouvernement. Et tout le monde, en choeur, de reprendre le même refrain « si les États n’interviennent pas, ça sera une catastrophe ». Et les États s’exécutent, pour le bien commun bien sûr.
Qu’est-ce qu’une banque ?
Une société qui emprunte de l’argent pour le reprêter, et, au passage, qui prend sa petite commission. Elle vous accueille avec le sourire pour recueillir votre argent, et s’empresse dès que la porte est fermée de le convertir en prêts de 10, 20 ou 30 ans pour votre voisin. Mais aujourd’hui, l’on découvre aussi que la banque spécule, qu’elle joue en bourse ou sur d’autres marchés l’argent du gentil client, qui pensait l’avoir déposé en toute sécurité dans un coffre-fort. Cette spéculation représente par exemple la moitié des bénéfices de la Société Générale. Pas négligeable ! Les banques seraient-elles aussi intrépides que des joueurs de casinos ? Non, bien sûr, car elles dominent le risque, elles maitrisent les aléas et se prémunissent contre les dangers. Mais finalement, si. Les banques jouent à la roulette en investissant des marchés ultra-risqués, comme les subprimes. Et lorsque la boule ne s’arrête pas sur leur couleur, elles perdent. Et comme d’autres banques, assurances, ou fonds d’investissement ont parié sur le fait que la première gagne… c’est tout le petit monde financier qui s’écroule.
Le libéralisme nous a toujours bercé de saintes intentions et d’un équilibre tellement « naturel » qu’il était implacable. Le genre d’erreurs ou de fautes qu’on constate aujourd’hui devait se résorber « naturellement », le marché devait se réguler de lui-même, et l’État devait à tout prix rester en dehors de tout ça, pour ne pas déséquilibrer ce système infaillible. Alors pourquoi aujourd’hui, faut-il que les collectivités financent des entreprises privées cupides qui se sont elles-mêmes enfoncées, provocant la crise mondiale ? Ces sociétés qui, depuis trente ans, se gavent de bénéfices… et qui au premier couac, se retrouvent toutes nues !
Ne serait-ce pas simplement un permis de faire n’importe quoi qu’on accorderait au secteur bancaire ? En même temps, aujourd’hui, si les banques coulent, qu’est-ce qui reste ? Que les consommateurs coulent, on s’en fout, et même, certains continuent d’encourager l’endettement personnel. Par contre, les banques…
Cette crise est en plein développement, malgré les déclarations de Christine Lagarde qui annonçait pendant l’été 2007 que le plus dur était passé… Les dominos se retrouvent en équilibre instable. Carlyle Group, la firme virtuelle qui joue avec les milliards comme d’autres jouent une grille de Keno à 1 euro, annonce une situation de cessation de paiement. Or, Carlyle n’est pas une banque, ni un assureur, c’est un investisseur. Et l’investissement étant le bras armé du capitalisme, c’est toute l’économie qui s’en ressentira. Pas de bras, pas de chocolat !
Dicton américain : 99% des banquiers donnent une mauvaise réputation à tous les autres