Les mots ont un sens"Faut qu'on les tue !" : les bonnes paroles des gardiens de la paix de Sainte-Soline
« Eux, faut leur tirer dans la gueule ! », « Faut qu’on les tue ! », « J’ai tiré 7 LBD, j’en ai couché au moins 4 des mecs. », « Un vrai kiff ! ». Le 25 mars 2023 à Sainte‑Soline, les forces de l’ordre abattent un déluge de feu sur les manifestants. Mediapart et Libé ont retrouvé les vidéos des caméras-piétons.
- Le 25 mars 2023 à Sainte-Soline, lors d’une manifestation anti-méga-bassines, organisée par Les Soulèvements de la Terre, le collectif Bassines non merci et la Confédération paysanne, 5 015 grenades (dont 1 375 explosives) et 81 munitions de LBD sont tirées en moins de deux heures : 45 gendarmes et environ 200 manifestants blessés. Serge, le plus gravement atteint (d’une grenade dans la tête), a passé deux mois dans le coma, entre la vie et la mort.
- L’objectif de la manif autour de ce trou dans la terre ? Faire une chaine humaine tout autour de la bassine et prendre de belles photos aériennes…
- Les observateurs de la Ligue des droits de l’Homme (LDH) parlent d’un usage « immodéré et indiscriminé » de la force sur « l’ensemble des personnes présentes », sans distinguer par âge, car il y avait des enfants et des personnes âgées.
- Mediapart et Libé ont récupéré plus de 84 heures de vidéos de caméras-piétons de gendarmes. Ils ont aussi eu accès aux retranscriptions, pour constater qu’elles ont été largement caviardées des passages les plus problématiques.
- Feu vert préfectoral donné à 12h35, les premières munitions sont tirées sans sommation (audible) sur le cortège bleu près de la bassine, puis, « vraisemblablement par erreur », sur le cortège rose, composé de familles inoffensives, confirmé par « Complément d’enquête ».
- Et c’est parti pour le show… le stade est chaud 🎶 Du jamais-vu de détonations et de nuages lacrymo envahit l’espace. Du sang aussi, beaucoup de sang… et quelques jurons.
- Best of de nos forces de sécurité, qu’on appelait pendant des décennies, jusqu’à récemment, les… gardiens de la paix.
(Un détail : les tirs tendus de grenades sont rigoureusement interdits tant ils sont dangereux. Ce sont ces tirs tendus qui ont gravement blessé Serge D., « Alix », Mickaël B., « Olivier » et d’autres anonymes…)
Citations :
— Eux, faut leur tirer dans la gueule !
— Faut qu’on les tue !
— Tendu, tendu, tendu !
— Tiens, ta mère la pute !
— J’ai tiré 7 LBD, j’en ai couché au moins 4 des mecs.
— Mec, j’ai mis une pleine tête avec une grenade 100 mètres, je l’ai bien vu.
— Mets-leur une GM2L dans la gueule !
— T’en crèves deux-trois, ça calme les autres !
— Je vais mettre des coups de bâton pleine tête, gros.
— Y a un enculé que j’ai eu à la tête mon gars.
— Là, ça serait bien de faire une nasse et vraiment de les massacrer !
— Je suis au Nirvana, là… On est sur l’Everest de la [gendarmerie] mobile.
— Ils disaient que dans le cortège, y avait des gamins. Bah… c’est le jeu, ils avaient qu’à pas les emmener.
— J’ai signé pour ça ! J’ai attendu 10 ans à la gendarmerie pour vivre ça.
— Je compte plus les mecs qu’on a éborgnés.
— Un vrai kiff !
— Une GENL dans les couilles, ça fait dégager du monde, hein !
— Ça fait du bien !
— C’était exceptionnel !
— C’était incroyable !
Incroyable… mais vrai !
Bizarrement, après deux ans d’enquête, aucun des gendarmes malfaisants n’a été identifié. D’ailleurs, aucun des gendarmes portant les caméras n’a jamais été interrogé. Et la police des gendarmes (IGGN) n’a jamais rien signalé au parquet. En contradiction avec l’article 40 du Code de procédure pénale qui dit que « Toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire qui, dans l’exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d’un crime ou d’un délit est tenu d’en donner avis sans délai au procureur de la République et de lui transmettre tous les renseignements… ».
Avec ce reportage de Partager c’est Sympa, pour bien comprendre 👇